vendredi 20 décembre 2013

Pourquoi la justice enquête sur la Cité du cinéma

Le parquet a lancé jeudi une procédure pour "délit de détournement de fonds publics et de recel de ce délit".

Pourquoi de l'argent public est venu financer en grande partie la Cité du cinéma de Luc Besson ? C'est la question posée après la publication en novembre dernier d'une note de la Cour des comptes. Dans ce rapport de 17 pages, révélé par Le Parisien, les magistrats de la rue Cambon évoquent des faits susceptibles d'être reconnus comme "délit de détournement de fonds publics et de recel de ce délit". Le parquet de Paris a donc ouvert jeudi une enquête préliminaire pour préciser les conditions le financement de ce pôle du 7ème art.
La Cité du cinéma, c'est quoi ? Imaginée par le réalisateur et producteur Luc Besson, la Cité du Cinéma s'étend sur 62.000 m2 et comprend neuf plateaux de tournage, des immeubles de bureaux, des ateliers de fabrication des décors, une salle de projection... Un mini Hollywood en banlieue parisienne. La Cité abrite aussi des locaux de formation de l'Ecole Nationale Supérieure Louis-Lumière, une école publique de cinéma.
La Cité du cinéma a été construite sur les fondations d'une ancienne centrale thermique, située à Saint-Denis, en Seine-Saint-Denis. Après deux ans de travaux de réhabilitation, ce complexe immobilier et technique entièrement dédié au 7ème Art, a finalement ouvert ses portes en septembre 2012.
>> A lire - La Cité du cinéma défie Hollywood
Combien ça a coûté ? Le montage financier de la Cité du cinéma a été bouclé en 2008. Il repose sur quelque 170 millions d'euros d'investissements privés et l'implication des pouvoirs publics par le biais de la Caisse des dépôts. Sur ces 170 millions d'euros, 140 millions ont servi à l'achat du foncier. Il est détenu à 100% par la société Nef-Lumière : 75% pour la Caisse des dépôts et 25% pour Vinci.
Les 30 millions d'euros restants ont été employés pour la construction des plateaux de tournage. Cette partie du budget provient des différentes sociétés de Luc Besson et de Quinta communications, le groupe du producteur et homme d'affaires tunisien, Tarak Ben Ammar.
L'emménagement de l'école Louis Lumière injustifié ? La Cité du cinéma perçoit par ailleurs de l'argent de l'école publique Louis Lumière. Un point qui interpelle la Cour des comptes. Dans leur rapport remis le mois dernier à Christiane Taubira, les Sages s'étonnent en effet que l'école Louis Lumière ait emménagé dans la Cité. L'établissement a signé un bail de douze ans d'une valeur de 23 millions d'euros, soit environ 2 millions d'euros par an. La Cour des comptes souligne que 4 millions d'euros auraient pourtant suffi à réhabiliter les anciens locaux de cette école située à Noisy-le-Grand.
Sarkozy a-t-il donné un coup de pouce au dossier ? Les Sages constatent aussi que, dès le départ, le projet de Cité du cinéma était risqué. Mais la Caisse des dépôts a tout de même jugé bon d'investir plus de 100 millions d'euros d'argent public. Une décision prise sans avoir la certitude que les studios accueilleraient des tournages de grandes productions internationales.
Selon le rapport, les patrons de la Caisse des dépôts ont fait fi de l'avis de leur propre service. Les auteurs de la note écrivent ainsi que le financement public de la Cité du cinéma a été décidé contre l'avis des services de l'Etat et de la Caisse des dépôts et consignations, principal financeur du projet".
Les patrons de la Caisse des dépôts sont suspectés d'avoir sollicité l'Elysée qui se serait alors fortement impliqué pour aider Luc Besson, qui, lui, n'a déboursé que 30 millions d'euros dans ce projet. A l'époque, c'était Nicolas Sarkozy qui occupait l'Elysée, appuyé par son secrétaire général, Claude Guéant. Les Sages soulignent au passage la proximité de Luc Besson avec les plus hautes sphères du pouvoir.
Que répond la société de Luc Besson ? EuropaCorp a estimé jeudi que "l'enquête démontrera que, pas plus que ses dirigeants ou actionnaires, elle n'a bénéficié d'un quelconque détournement de fonds publics". Et d'ajouter : "le temps est venu de voir levée une suspicion infondée".
En novembre, la société de Luc Besson avait assuré que la Cité du cinéma avait "été financée par un partenariat public-privé (La Caisse des Dépôts et le Groupe Vinci) et c'est ce modèle de financement qui a permis sa réalisation - sans l'intervention financière de la Seine-Saint-Denis".

http://www.europe1.fr/Infos/France/

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