jeudi 10 octobre 2013

Toulouse. Enquête sur la mafia du cuivre

L’arrestation mardi à Toulouse d’une équipe soupçonnée de nombreux vols de cuivre remet en lumière la problématique de la mafia des métaux. Des équipes qui, derrière la misère des «petites mains», servent des organisations structurées. À l’échelle européenne, l’enjeu se chiffre en milliards d’euros.
D’un côté, la misère des campements, des bidonvilles tremblants sans hygiène ni espoir. De l’autre, des entreprises pillées par les voleurs de cuivre et qui comptent leurs pertes : 35 millions d’euros pour la SNCF en 2011 auxquels il faut ajouter 5 800 heures de retard cumulé sur la circulation des trains. En 2010, EDF, via ses filiales de distribution et de transports, évaluait ses pertes à 15 millions d’euros. À Toulouse, au cours de l’été, Autoroutes du Sud de la France s’est porté partie civile à trois reprises contre des voleurs interpellés en train de tirer des câbles d’alimentation électrique sur les bords du périphérique. Préjudice : plus de 100 000 euros.
Cette chasse aux métaux, et notamment le cuivre (qui représente près de 60 % des vols constatés) n’est pas une spécificité française. Aucun pays européen n’y échappe. Au point qu’une organisation européenne, POL-PRIMET, regroupe forces de sécurité, entreprises et pouvoirs publics pour tenter de trouver des réponses efficaces.
En revanche, la France dispose d’une législation «sans doute la plus adaptée», souligne un spécialiste. La Fédération française des recycleurs de métaux a signé une convention de bonne conduite, ratifiée par 1 300 entreprises du secteur (mais pas encore en Haute-Garonne)… Livre de police, paiement par chèque, etc. «Ils essayent de faire le ménage même si cela n’empêche pas les brebis galeuses», glisse un observateur. Dans l’Hérault, en février, une entreprise a été fermée quand la justice, après une enquête de la gendarmerie, a démontré que le recycleur recelait à la tonne. Lors des perquisitions, 15 tonnes des métaux «probablement» volés avaient été découverts.
À qui profitent ces vols très organisés ? «A des organisations criminelles», répond le colonel Patrice Bayard, chef de l’Office central de lutte contre la délinquance itinérante. «On parle beaucoup des Roms, mais ce ne sont pas les seuls à agir. Et il faut se méfier de l’arbre qui cache la forêt. Oui, des Roms sont malheureusement exploités en France ou dans d’autres pays de l’Union européenne, mais en Roumanie, dans les villages dont ils sont originaires, tous ne vivent pas dans des bidonvilles. On trouve aussi de magnifiques villas à l’architecture délirante avec des garages aux sols de marbre qui accueillent des voitures de luxe !»
Parce que, derrière la misère des camps pouilleux de Toulouse ou d’ailleurs, existent des groupes structurés, terriblement efficaces et très organisés. Aussi efficaces dans les vols de métaux que dans les cambriolages ou la prostitution. Et jamais à court d’une nouvelle idée. L’Office central de lutte contre la délinquance itinérante travaille actuellement sur des «équipes» venues de l’Est spécialisées dans les vols de moteurs de bateaux ou d’ULM (!), d’autres qui préfèrent les tracteurs ou encore les pots catalytiques ! Ces professionnels de la mécanique sont capables de démonter cent pots en une nuit en région parisienne ! Pour les victimes, la facture est salée : 1 600 € chez un garagiste. Les voleurs restent pragmatiques. Ce qui les intéresse, ce sont les métaux précieux qui permettent la filtration efficace des gaz d’échappement…
http://www.ladepeche.fr/article/2013/10/10/1728032-toulouse-enquete-sur-la-mafia-du-cuivre.html

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