lundi 20 août 2012

Ariège : le crime inexpliqué de la jeune serveuse

Un assassinat. Un suspect arrêté. Au bout, des aveux précis et circonstanciés. L’enquête sur la de Kevin Sellier, 19 ans, tué à coups de couteau le 24 mars dernier sur un chemin de montagne de l’Ariège, a tout d’un dossier bouclé. Pourtant, dans les rues de Saverdun, bourg occitan typique aux façades orange délavées, les gendarmes continuent leur travail. Ici, vivait Cindy P., 20 ans, une amie de la victime. D’abord entendue comme témoin, elle avouera finalement avoir poignardé Kevin et brûlé son . Depuis, la jolie serveuse au-dessus de tout soupçon dort en prison. Les enquêteurs, eux, s’arrachent les cheveux : son mobile ne tient pas.

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. Le 11 mai, un squelette calciné est découvert par un promeneur dans un sous-bois près de Pamiers. Les analyses ADN permettent d’identifier le corps de Kevin Sellier, disparu fin mars, connu pour divers vols et petits trafics. Les gendarmes de la section de recherche de Toulouse imaginent alors un règlement de comptes sur fond de drogue. « Les factures de son portable vont être analysées, et permettre de reconstituer ses dernières heures », détaille alors une source judiciaire. Les enquêteurs découvrent que le 23 mars, Kevin a passé la nuit chez une amie, Cindy, à Saverdun. Auditionnée, sa colocataire révèle que les deux sont allés pique-niquer en voiture le lendemain, à l’initiative de Cindy. Placée en garde à vue, cette dernière craque.

Aux gendarmes médusés, la jeune femme raconte être partie avec Kevin et Joan, un ancien camarade de classe, en direction de la montagne. En chemin, le trio s’arrête pour une pause pipi. Joan s’éclipse dans un buisson. A son retour, Cindy est en train de poignarder Kevin au bord de la route. Elle réclame l’aide de Joan pour cacher le corps. Pétrifié, il s’exécute. Le cadavre est traîné dans un bois sur une centaine de mètres. Cindy l’asperge avec de l’alcool caché dans sa voiture, y met le feu, et quitte les lieux avec Joan. « Dès lors, elle était dans le déni : rien ne s’était passé, il fallait oublier cette histoire », souligne une source proche de l’affaire.

Le dossier est solide. Cindy est mise en examen pour « assassinat ». Reste à déterminer le mobile. Mais là, plus rien ne va. La serveuse raconte d’abord que Kevin a volé 420 € chez son grand-père, cinq jours plus tôt. Les gendarmes constatent qu’une plainte a bien été déposée, mais trouvent l’épisode trop léger pour expliquer une telle violence.
Cindy évoque alors une histoire plus sombre, qui se serait déroulée chez elle, une semaine avant les faits. Lors d’un après-midi entre amis, elle s’éclipse dans sa chambre pour une courte sieste. A son réveil, Kevin est allongé sur elle, en train de la violer. Cindy s’extirpe « d’un coup de reins », s’enferme dans la salle de bains, et pleure « durant deux heures ». Le jour du crime, alors qu’ils étaient seuls dans la voiture, Kevin aurait de nouveau tenté de l’abuser, déclenchant, dit-elle, son geste meurtrier.

Perplexes, les enquêteurs veulent vérifier ses dires. Les amis de Cindy présents le jour du prétendu viol sont entendus. « Personne n’a rien remarqué, et personne ne les a vus s’absenter aussi longtemps », relève une source proche du dossier. Pas un cri, pas un bruit. Surtout, pourquoi Cindy n’a-t-elle rien dit à ses amis? « Je ne voulais pas faire d’histoires. J’essaie de paraître plus forte que je ne le suis », justifie-t-elle. Avant de se rappeler avoir raconté la scène à Joan, peu après les faits. Qui, là encore, n’a aucun souvenir de cette confession.

La piste d’une vengeance étant jugée peu crédible, les gendarmes épluchent le passé de la jeune femme. Une enfance équilibrée malgré un divorce. Une scolarité moyenne, mais une employée appréciée de ses patrons. Un petit ami aimant, militaire dans la région. Pas de faille apparente, ni d’antécédents judiciaires ou psychiatriques. En détention, « elle pleure beaucoup, dit regretter son geste, et répète que ce viol refoulé a déclenché ce qu’elle décrit comme un coup de folie », souligne un proche. Pourtant, jusqu’à aujourd’hui, « personne ne sait vraiment quel est le mobile de cet acte extrême », résume le procureur de Toulouse, Michel Valet. D’où ce constat : élucidé, le meurtre de Kevin Sellier reste à ce jour inexpliqué.


 http://www.leparisien.fr/faits-divers/le-crime-inexplique-de-la-jeune-serveuse-20-08-2012-2131002.php

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