mardi 29 novembre 2011

Drame des Ardennes / Le père était dépressif

Aucune hypothèse n'est encore exclue. Le mystère reste entier autour de la mort des quatre membres d'une famille du Pas-de-Calais, retrouvés samedi dans un gîte des Ardennes. Le drame familial demeure le plus probable, mais un élément nouveau incite le parquet de Reims à la plus grande prudence.

LA femme et les enfants sont morts par asphyxie. Deux jours après la découverte des corps sans vie de quatre membres d'une même famille du Pas-de-Calais, au sein d'un gîte rural de Lalobbe, dans les Ardennes (nos éditions précédentes), c'est ce qu'a confirmé le procureur de la République de Reims, Fabrice Belargent, hier, lors d'une conférence de presse consécutive à leur autopsie pratiquée quelques heures plus tôt à l'institut médico-légal de la cité des Sacres.
Dimanche, l'examen du mari avait conclu à une mort par pendaison. Aucune trace de violence, de lésions de défense ou d'intervention d'un tiers n'a été relevée. Aucune trace d'effraction non plus, d'ailleurs.
Pour autant, toutes les hypothèses restent ouvertes à ce jour. Rien ne permet en l'état de l'enquête de conclure avec certitude à un drame familial.
La thèse d'un crime commis par un tiers n'est toujours pas exclue. Le mystère, en tout cas, reste entier, notamment quant aux circonstances et à la chronologie des faits qui ont conduit à la disparition tragique de Grégory Michel, 34 ans, de sa compagne Vanessa Delattre, 33 ans, et de leurs deux enfants Lilian, 2 ans, et Loïc, âgé de trois semaines.
Les investigations techniques et médico-légales n'ont pas encore permis de déterminer l'ordre dans lequel ces habitants de Gouy-sous-Bellonne ont trouvé la mort. Mais surtout, rien ne permet pour le moment d'éclairer les enquêteurs de la section de recherches de Reims sur le mobile du crime. Ces derniers n'ont retrouvé qu'un morceau de papier posé en évidence sur une table basse, sur lequel étaient inscrites, en lettres manuscrites, les coordonnées du père et de la mère de Grégory Michel.

Toujours rien sur le mobile

Décrit comme un « couple uni » de longue date, l'homme et la femme ne semblaient pas rencontrer de difficultés particulières, ni financières ni professionnelles, pas plus que personnelles. En plus d'effectuer quelques missions de remplacement comme agent de sécurité, Grégory Michel venait de créer une auto-entreprise par le biais de laquelle il faisait le commerce de produits divers sur le Net.
Travaillant pour une plateforme d'appels téléphoniques, Vanessa Delattre se trouvait quant à elle en congés maternité.
Le couple, très branché nature, avait réservé sa location quinze jours avant les faits, via une centrale de réservation des gîtes de France.
Arrivé une semaine plus tôt dans les Ardennes - département qu'il connaissait pour y avoir déjà séjourné -, il avait été aperçu, jeudi, faisant des courses dans les environs. Mais, dès le soir-même, la famille semble n'avoir plus donné aucun signe de vie.
Les gendarmes ont retrouvé sur les lieux un cahier dans lequel Vanessa Delattre notait scrupuleusement les heures d'allaitement de son nourrisson. Aussi sait-on qu'elle a donné le sein pour la dernière fois à 19 h 45 ce soir-là, puis plus rien. Les relevés téléphoniques font également état de plusieurs appels entrants et sortants aux alentours de 19 heures, dont le père de Grégory Michel qui a appelé son fils avant que tout contact ne soit rompu.

Aucune violence de défense

La famille n'a ensuite jamais été revue. Ni vendredi ni samedi avant que le propriétaire du gîte ne découvre, à travers une fenêtre, la silhouette de Grégory Michel, pendu à une poutre dans le salon du rez-de-chaussée.
Tout laisse donc à penser que le drame s'est noué entre jeudi soir, 19 h 45, et samedi matin, 10 heures. Plus certainement même, jeudi soir, aux alentours de 22 heures. La famille avait dîné et les enfants, une fois déshabillés, avaient été couchés. Contrairement à leurs parents qui, manifestement, n'étaient pas sur le point de dormir. Le père était vêtu normalement d'un pantalon et d'un tee-shirt. Sa compagne portait une tenue de sport.
Reste à savoir ce qui s'est véritablement passé sous le toit de ce gîte où les gendarmes ont retrouvé, dans un silence sépulcral, les corps sans vie de cette famille que rien ne semblait accabler. La lumière pourrait désormais venir des analyses toxicologiques, ainsi que celles portant sur le ruban adhésif avec lequel Vanessa Delattre a été ligotée à une chaise et bâillonnée.
De même pour le sac en plastique qui lui recouvrait le visage. Et cela pour une bonne raison.
L'enquête menée du côté du Pas-de-Calais dans l'entourage quelque peu incrédule du couple, fait en effet ressortir un élément important : depuis quelque temps, Grégory Michel souffrait de « troubles psychologiques à caractère dépressif », dont les causes ne sont pas connues. Selon ses proches, il consultait un médecin qui lui avait prescrit des antidépresseurs. Médicaments qui ont été retrouvés sur les lieux du crime. En revanche, les gendarmes n'ont pu mettre la main sur la moindre ordonnance.
Cet élément ne manque cependant pas d'ajouter aux zones d'ombre déjà nombreuses dans cette affaire. Dans l'attente des résultats d'analyses, il alimente surtout la possibilité que l'un ou l'autre des membres de cette famille ait été drogué, ce qui pourrait expliquer l'absence de violences et de lésions de défense sur les corps de Vanessa Delattre et ses enfants, mais aussi l'absence de désordre.
C'est pourquoi le parquet de Reims n'exclut pas, non plus, l'hypothèse que Grégory Michel ait pu être neutralisé de cette manière avant d'être pendu par un tiers qui aurait mis en scène son suicide. D'autant que si aucune trace d'effraction n'a été constatée, la porte arrière n'avait pas été verrouillée et offrait ainsi, à quiconque, tout loisir de pénétrer librement dans les lieux.
Les limiers de la SR de Reims ont encore une semaine pour boucler leur enquête de flagrance. Outre l'attente des résultats d'analyses, des repérages téléphoniques sont en cours afin de reconstituer l'emploi du temps du couple.
Une enquête menée de façon « logique et progressive », a indiqué le parquet de Reims qui continue d'observer la plus grande prudence dans cette affaire.

http://www.lunion.presse.fr/article/ardennes/drame-des-ardennes-le-pere-etait-depressif

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