mardi 24 février 2015

Révélations sur Jo Masanet, l'homme au cœur du scandale de la PJ

Le grand patron de l’Association des œuvres sociales de la police nationale (Anas) dort depuis le 6 février dans une cellule de la maison d’arrêt de Fresnes (Val-de-Marne). Joaquin Masanet, 62 ans, figure du syndicalisme policier pendant près de trente ans au sein de l’Unsa- Police, se retrouve au cœur du nouveau scandale qui a également entraîné le limogeage du patron de la police judiciaire de Paris, Bernard Petit, et de son chef de cabinet, Richard Atlan.
La justice le soupçonne notamment d’avoir « missionné » un de ses hommes liges au sein de l’Anas, Philippe Lemaître, pour se renseigner auprès du directeur de la PJ sur une enquête en cours visant l’ex-préfet, fondateur du GIGN, l’unité d’élite de la gendarmerie, Christian Prouteau.

Mais au fil de leurs investigations, les policiers de la division nationale des enquêtes (DNE) de l’inspection générale de la police nationale (IGPN), la police des polices, ont établi que celui qui se fait surnommer Jo avait assez largement dépassé le cadre des « missions d’action sociale de l’Anas ».

La construction d’une piscine surfacturée
C’est un des points essentiels de cette affaire. La réalisation d’une piscine couverte dans le centre de vacances des Moutiers-en-Retz (Loire-Atlantique) devait s’élever à près de 700 000 €. La facture finale réglée par l’Anas a atteint les 990 000 €. Le commissaire aux comptes de l’association a signalé les faits au procureur de Paris, qui a ouvert une enquête préliminaire en décembre 2014. Dans le même temps, le patron d’une entreprise intervenant sur ce chantier a versé près de 14 000 € en chèque sur les comptes de Joaquin Masanet. « Dans cette histoire, Jo Masanet et l’Anas ont été victimes d’une escroquerie, avance son avocate, Me Mercier. D’ailleurs, une procédure civile contre les sociétés intervenantes a été engagée et, sans doute, une procédure pénale va suivre. Et le fait de percevoir 14 000 € par un des entrepreneurs sur près de 300 000 € de surfacturation, c’est un pourboire au planton. Ça n’a pas de sens ! »

Versements douteux et addiction au jeu
Au moment de son placement en garde à vue, le 4 février, Jo Masanet est dans une situation financière plus que précaire. Selon les documents que notre journal a pu consulter, cet homme à la carrure de catcheur est « pris à la gorge ». Son compte bancaire présente d’importantes anomalies de fonctionnement. « S’il pouvait cumuler un solde régulièrement débiteur pouvant aller jusqu’à - 20 000 €, il semblait bénéficier de revenus autres que ceux déclarés aux services fiscaux », relate un enquêteur dans un rapport de synthèse. Selon la même source, depuis 2011, Jo Masanet aurait effectué des dépôts en liquide d’un montant de 120 000 € et de près de 95 000 € en chèques sur son compte. Des montants formellement contestés par son avocate. « Il a reçu des versements d’un montant de 4 000 ou 4 500 € tout au plus, soutient-elle. Il s’agit de prêts amicaux, sans intérêt et sans contrepartie aucune. »

Sur ce point, le président de l’Anas a,lui, indiqué dans un premier temps au cours de sa garde à vue que les espèces versées sur son compte ainsi que les chèques correspondaient à des gains « au PMU ». Par ailleurs, les enquêteurs ont déterminé que Jo Masanet avait dépensé, sur la même période, près de 90 000 € en paris hippiques. A la question de savoir s’il avait une addiction au jeu, l’intéressé a d’abord réfuté toute dépendance avant de reconnaître « avoir une addiction au jeu ». « Vous m’avez mis sur ce sujet devant le fait accompli, je vais me faire soigner, j’ai été peut-être léger dans ma situation personnelle, finit-il par admettre. Pour ce qui est de l’Anas, c’est bien géré, j’essaie de m’occuper au mieux. »

Pourtant, le même homme est enregistré en train de demander pour « 300 € de notes de repas », jamais consommés, dans un restaurant situé à deux pas du ministère de l’Intérieur. « Certes, cette demande existe, mais il ne s’est jamais fait rembourser par l’Anas », le défend encore son avocate.

Des demandes régulières d’intervention aux autorités
Au cours de la perquisition du siège de l’Anas à Joinville-le-Pont (Valde- Marne), les boeufs-carottes de l’IGPN ont mis la main sur plusieurs dizaines d’avis de contraventions ou d’amendes forfaitaires majorées. Entendu sur ce point, Jo Masanet a indiqué qu’il s’agissait « d’amendes, soit de véhicule de l’Anas, soit de gens que je connais et qui me demandent d’intervenir en leur faveur, sans aucune contrepartie, bien entendu ». Mais plusieurs de ces amendes correspondent à des véhicules appartenant à des amis restaurateurs qui, par ailleurs, lui ont prêté de l’argent.

Plusieurs autres documents saisis ont trait à des demandes de régularisation de séjours sur le territoire français ou de naturalisation. Au fil d’une écoute sur le portable de Jo Masanet, les policiers découvrent qu’il sollicite en direct le préfet du Val-de-Marne, Thierry Leleu. Ce dernier lui répond, à la question de savoir où en est une démarche de naturalisation, qu’il ne peut y donner suite. Le couple demandeur ayant été condamné pour « travail clandestin » et « faux et usage de faux ». Le préfet précise même que ce couple fait aussi l’objet d’« une enquête approfondie » des services du renseignement…Le préfet de police de Paris, Bernard Boucault, est également la cible de demandes de Jo Masanet. L’homme fort de l’Anas n’hésite pas à lui mentir afin de faire sortir la voiture d’un de ses « prêteurs d’argent », placée en fourrière, en arguant qu’il travaillait pour le compte de son association.

http://www.leparisien.fr/faits-divers/revelations-sur-jo-masanet-l-homme-au-coeur-du-scandale-de-la-pj-24-02-2015-4555147.php

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