« C’était une affaire simple. Nous avions une victime, une histoire, un suspect. Aujourd’hui, on ne sait plus. » Le commentaire de Me Elisabeth Auerbacher, l’avocate des parents de Nathalie Davids, la première victime tuée le 27 novembre 2011, résume parfaitement le dossier. L’affaire des crimes de l’Essonne compte en effet deux suspects : Michel Courtois, 46 ans, mis en examen pour le premier meurtre, et Yoni Palmier, 33 ans, mis en cause pour les quatre crimes.
Le 1er décembre 2011, quatre jours après le meurtre de la laborantine Nathalie Davids dans le parking souterrain de sa résidence, rue Pasteur à Juvisy (Essonne), son amant Michel Courtois est arrêté et craque à sa cinquième audition en garde à vue. Un crime passionnel classique comme les policiers de la brigade criminelle de Versailles (Yvelines) en traitent souvent.
Un sentiment de « confort »
Mais le 22 février, dans le même parking de la même résidence, à quelques mètres de la première scène de crime, Jean-Yves Bonnerue est abattu d’une balle dans la tête. Et l’arme utilisée est identique à celle du premier meurtre. « Certains d’entre nous ont compris à cet instant que nous étions en présence d’un tueur en série », commente un enquêteur.
Les policiers se réunissent, font appel à un psychologue profileur et revisionnent les auditions de Michel Courtois, incarcéré au moment du deuxième crime. « Les différentes auditions de ce suspect n’ont pas été menées dans les règles de l’art », affirme même une autre source, évoquant des questions « un peu orientées ». Courtois évoquera même plus tard la scène suivante : les policiers l’obligent à changer ses vêtements pour revêtir un sweat-shirt portant l’inscription « haute trahison ». « Tous ces éléments et le profil d’un homme qui semble finir par dire oui à tout, nous ont fait douter de ses aveux », avance une source judiciaire.
Tous les enquêteurs ne sont pas d’accord pour autant. « C’était certes la même arme, mais la première victime avait été atteinte de plusieurs tirs alors que la deuxième avait été abattue d’un seul projectile tiré en pleine tête. Cela pouvait laisser croire qu’il y avait deux tireurs différents », détaille un policier. En revanche, les investigateurs s’interrogent sur l’unité de lieu des deux premiers crimes. Le profileur y voit une indication précieuse, suggérant un sentiment de « confort » du tueur dans cet endroit, d’autant qu’il semble posséder un « bip » d’accès au souterrain. Un groupe d’enquêteurs se charge de lister tous les occupants de la résidence, actuels ou passés, ainsi que ceux qui possèdent ou louent des places dans le parking.
300 motards recensés
Le 17 mars, Marcel Brunetto est tué dans son hall d’immeuble à Ris- Orangis, puis le 5 avril, Nadjia Lahcène, dans son immeuble elle aussi, à Grigny. Encore la même arme. Les policiers sont cette fois clairement sur les dents. Plusieurs groupes sont constitués pour éplucher toutes les pistes. Un groupe notamment s’occupe de la fameuse moto Suzuki GSX-R décrite par différents témoins, un autre écume les armureries et les clubs de tir de la région à la recherche de renseignements. Le « groupe moto » recense plus de 300 propriétaires d’un engin de ce type et entreprend vérifications et visites domiciliaires systématiques. L’une de ces visites le mène à une adresse où figurent deux noms sur la boîte aux lettres, dont celui d’un certain Yoni Palmier, qui n’est pas le propriétaire officiel de la moto qui figure sur leur liste. C’est Palmier qui leur ouvre la porte avant de leur confirmer le plus calmement du monde qu’il n’est pas le propriétaire de la moto et que l’autre nom figurant sur la boîte aux lettres est celui d’un ancien occupant de l’appartement. Les policiers tournent les talons mais rendent immédiatement compte de cette visite étrange. C’est à ce moment que le nom Palmier fait tilt chez les investigateurs. En effet, le groupe chargé de faire des recherches chez les armuriers a entendu parler d’un Palmier : un jeune homme dont le commerçant s’est souvenu spontanément en raison de son comportement bizarre. « Il venait souvent, posait beaucoup de questions sur les armes, les munitions, et, surtout, gardait son casque de moto ou sa cagoule de motard sur la tête à l’intérieur même du magasin », explique une source judiciaire.
A cet instant, les enquêteurs sentent qu’ils tiennent la bonne piste. Une impression vite confirmée lorsqu’ils découvrent que ce Yoni Palmier louait l’emplacement no 123 depuis mars 2009 dans le parking de la rue Pasteur à Juvisy. Un lieu qu’il connaissait bien, et où, selon le profileur, il se serait senti « confortable » pour commettre ses premiers meurtres. Les deux premiers de sa funeste série.
http://www.leparisien.fr/faits-divers/tueur-de-l-essonne-dans-les-coulisses-de-l-enquete-04-05-2012-1984073.php
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