jeudi 29 septembre 2011

L'accident toujours privilégié, la psychose en embuscade

La journée a été particulièrement pénible pour plus d'un, hier. Une famille est de nouveau endeuillée après la noyade d'un jeune de 19 ans dans la Deûle, à Lille. De leur côté, les autorités s'acharnent à trouver de nouvelles armes face à l'alcoolisation frénétique et... à la psychose.

Une sortie de cours pas franchement comme les autres hier à l'Institut catholique de Lille. Les étudiants de première année en médias, communication et culture, la promotion de Lloyd Andrieu, quittent la salle d'espagnol. Blêmes, les dents serrées, ils ont du mal à évoquer un camarade rencontré pour la première fois il y a à peine quinze jours. « On ne se connaissait pas vraiment », lâche Maxime, 21 ans. Pas vraiment ?
Maxime avait, dès la rentrée, accepté une invitation pour un « apéro » chez Lloyd. Horaires ? « 21 h 30 - 1 heure du matin », complète Romane, 17 ans, une autre convive, également camarade de cours.
On ne sait pas si le binge drinking aura compté parmi les invités. Le binge drinking ? Une pratique importée des pays anglo-saxons et consistant à s'alcooliser le plus possible, le plus vite possible. Au moment où son corps a été retrouvé, mardi, « Lloyd Andrieu avait 1,81 gramme d'alcool dans le sang », soulignait, hier, Frédéric Fèvre, le procureur de la République de Lille, à l'occasion d'un point presse. Dans cette série des noyés de la Deûle, on sent une détresse générale. Chez les proches des victimes, mais également autour de l'enquête.

Une voix sans visage

Même si le mot psychose a été soigneusement évité hier au palais de justice de Lille, on en était bien là. « Si on apprend que c'est un pousseur, je ne sors plus de chez moi ! », résume une étudiante de la Catho. Justement... Frédéric Fèvre, épaulé par le patron de la PJ de Lille, est clair : « L'enquête repart de zéro. » Pour compléter aussitôt : « Nous déployons un maximum de moyens. Nous allons travailler vite et bien. » Le but n'est pas caché : « Fermer toutes les portes . » Aucune thèse ne peut être négligée, y compris celle du pousseur, mais l'ennemie principale, c'est la psychose. Les trois noyés précédents sont dans tous les esprits.
C'est la raison pour laquelle quinze enquêteurs de la brigade criminelle de la PJ sont sur la brèche. D'où l'urgence, également, de retrouver un mystérieux correspondant. Une voix sans visage. Dans la nuit de jeudi à vendredi, et avec le portable de la victime, précise Frédéric Fèvre, un inconnu a appelé au hasard à partir du répertoire de Lloyd Andrieu. Son message à un copain : « Votre ami a besoin d'aide. Pouvez-vous intervenir ? »
Lloyd venait de disparaître. L'alerte a été donnée trois jours plus tard. Mardi, le corps était retrouvé flottant dans la Deûle, à côté de l'Esplanade. Qui est derrière cette voix ? La PJ lance un appel à témoins pour retracer les derniers mouvements de l'étudiant et inciter ce témoin à sortir de l'ombre.
L'enjeu est de taille. Comment lutter contre la thèse d'un « serial pousseur » ? Un inconnu a pris le téléphone de la victime. Un portable qui a disparu et qui fait, dorénavant, l'objet de très sérieuses vérifications. « Personne ne croit à la thèse de l'accident », résumait hier soir Camille, une ancienne camarade de lycée de la victime. Personne chez les étudiants, personne dans de grandes parties de la population. Et les questions de fuser : pourquoi avoir appelé un ami plutôt que les secours ? « Dans les situations d'urgence, les réactions ne sont pas forcément rationnelles », explique une source proche de l'enquête. Quelle place la rationalité peut-elle se tailler dans ce type d'affaire ?

Symptômes

Toujours hier, c'était l'union sacrée à l'hôtel de ville de Lille. Élus et responsables de la Catho ont, main dans la main, soutenu la thèse de l'accident. L'occasion au passage pour Roger Vicot, adjoint au maire à la sécurité, de saluer un nouvel arsenal répressif permettant de mieux sanctionner les épiceries de nuit vendant de l'alcool en dehors des règles. « On ne peut pas mettre cinq, six, dix policiers municipaux le long de la Deûle 24 heures sur 24, déplore l'élu. Et dans leurs compétences, les villes ne peuvent traiter que les symptômes d'un grave problème de société, l'alcool chez les jeunes. »
Appel à témoins. PJ : 03 20 30 37 25.
http://www.lavoixdunord.fr/Region/actualite/Secteur_Region/2011/09/29/article_l-accident-toujours-privilegie-la-psycho.shtml

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